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    J'ai aimé une fleur
    Elle m'a appris l'amour
    Elle m'a appris les pleurs

    C'était si naturel
    J'étais tellement pollué

    Elle était tellement belle
    J'aimais la renifler

    La fleur

    Alors je ferme les yeux
    Pour reprendre des couleurs

    Mais l'orage m'émeut
    Et le noir me fait peur

    La tristesse m'assassine
    C'est la mort qui m'effleure

    J'ai perdu c'est un signe
    Capucine ta fleur

    La fleur

                                       M


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  • Holà, gardeur de troupeaux,

    Sur le bord de la route,

    Que te dit le vent qui passe ?

     

    « Qu'il est le vent ,et qu'il passe,

    Et qu'il est déjà passé,

    Et qu'il passera encore.

    Et à toi, que te dit-il ? »

     

    « Il me dit bien davantage.

    De maintes autres choses il me parle.

    De mémoires et de saudades

    Et de choses qui n'ont jamais été. »

     

    « Tu n'as jamais entendu passer le vent.

    Le vent ne parle que de vent.

    Ce que tu as entendu était mensonge,

    Et le mensonge est en toi. »

     

     

     

    Alberto Caeiro,

     

    Hétéronyme de Fernando Pessoa.


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  • Ne me quitte pas
    Il faut oublier
    Tout peut s'oublier
    Qui s'enfuit déjà
    Oublier le temps
    Des malentendus
    Et le temps perdu
    A savoir comment
    Oublier ces heures
    Qui tuaient parfois
    A coups de pourquoi
    Le cœur du bonheur
    Ne me quitte pas
    Ne me quitte pas
    Ne me quitte pas
    Ne me quitte pas

    Moi je t'offrirai
    Des perles de pluie
    Venues de pays
    Où il ne pleut pas
    Je creuserai la terre
    Jusqu'après ma mort
    Pour couvrir ton corps
    D'or et de lumière
    Je ferai un domaine
    Où l'amour sera roi
    Où l'amour sera loi
    Où tu seras reine
    Ne me quitte pas
    Ne me quitte pas
    Ne me quitte pas
    Ne me quitte pas

    Ne me quitte pas
    Je t'inventerai
    Des mots insensés
    Que tu comprendras
    Je te parlerai
    De ces amants-là
    Qui ont vu deux fois
    Leurs cœurs s'embraser
    Je te raconterai
    L'histoire de ce roi
    Mort de n'avoir pas
    Pu te rencontrer
    Ne me quitte pas
    Ne me quitte pas
    Ne me quitte pas
    Ne me quitte pas

    On a vu souvent
    Rejaillir le feu
    D'un ancien volcan
    Qu'on croyait trop vieux
    Il est paraît-il
    Des terres brûlées
    Donnant plus de blé
    Qu'un meilleur avril
    Et quand vient le soir
    Pour qu'un ciel flamboie
    Le rouge et le noir
    Ne s'épousent-ils pas
    Ne me quitte pas
    Ne me quitte pas
    Ne me quitte pas
    Ne me quitte pas

    Ne me quitte pas
    Je ne vais plus pleurer
    Je ne vais plus parler
    Je me cacherai là
    A te regarder
    Danser et sourire
    Et à t'écouter
    Chanter et puis rire
    Laisse-moi devenir
    L'ombre de ton ombre
    L'ombre de ta main
    L'ombre de ton chien
    Ne me quitte pas
    Ne me quitte pas
    Ne me quitte pas
    Ne me quitte pas.

    Jacques Brel, 1959.


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  • Au village, sans prétention
    J'ai mauvaise réputation.
    Qu'je m'démène ou qu'je reste coi
    Je pass' pour un je-ne-sais-quoi!
    Je ne fais pourtant de tort à personne
    En suivant mon chemin de petit bonhomme.
    Mais les brav's gens n'aiment pas que
    L'on suive une autre route qu'eux
    Non les brav's gens n'aiment pas que
    L'on suive une autre route qu'eux
    Tout le monde médit de moi
    Sauf les muets, ça va de soi.

    Le jour du Quatorze Juillet
    Je reste dans mon lit douillet.
    La musique qui marche au pas
    Cela ne me regarde pas.
    Je ne fais pourtant de tort à personne
    En n'écoutant pas le clairon qui sonne.
    Mais les brav's gens n'aiment pas que
    L'on suive une autre route qu'eux
    Non les brav's gens n'aiment pas que
    L'on suive une autre route qu'eux
    Tout le monde me montre du doigt
    Sauf les manchots, ça va de soi.

    Quand j'croise un voleur malchanceux
    Poursuivi par un cul-terreux;
    J'lance la patte et pourquoi le taire
    Le cul-terreux s'retrouv' par terre
    Je ne fais pourtant de tort à personne
    En laissant courir les voleurs de pommes.
    Mais les brav's gens n'aiment pas que
    L'on suive une autre route qu'eux
    Non les brav's gens n'aiment pas que
    L'on suive une autre route qu'eux
    Tout le monde se rue sur moi
    Sauf les culs-de-jatte, ça va de soi.

    Pas besoin d'être Jérémie
    Pour d'viner l'sort qui m'est promis
    S'ils trouv'nt une corde à leur goût
    Ils me la passeront au cou
    Je ne fait pourtant de tort à personne
    En suivant les ch'mins qui n'mènent pas à Rome
    Mais les brav's gens n'aiment pas que
    L'on suive une autre route qu'eux
    Non les brav's gens n'aiment pas que
    L'on suive une autre route qu'eux
    Tout l'mond' viendra me voir pendu
    Sauf les aveugles, bien entendu

     

     

     

    Georges Brassens


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  • Dans l'alcôve sombre,
    Près d'un humble autel,
    L'enfant dort à l'ombre
    Du lit maternel.
    Tandis qu'il repose,
    Sa paupière rose,
    Pour la terre close,
    S'ouvre pour le ciel.

    Il fait bien des rêves.
    Il voit par moments
    Le sable des grèves
    Plein de diamants,
    Des soleils de flammes,
    Et de belles dames
    Qui portent des âmes
    Dans leurs bras charmants.

    Songe qui l'enchante !
    Il voit des ruisseaux.
    Une voix qui chante
    Sort du fond des eaux.
    Ses sœurs sont plus belles.
    Son père est près d'elles.
    Sa mère a des ailes
    Comme les oiseaux.

    Il voit mille choses
    Plus belles encor ;
    Des lys et des roses
    Plein le corridor ;
    Des lacs de délice
    Où le poisson glisse,
    Où l'onde se plisse
    À des roseaux d'or !

    Enfant, rêve encore !
    Dors, ô mes amours !
    Ta jeune âme ignore
    Où s'en vont tes jours.
    Comme une algue morte
    Tu vas, que t'importe !
    Le courant t'emporte,
    Mais tu dors toujours !

    Sans soin, sans étude,
    Tu dors en chemin ;
    Et l'inquiétude,
    À la froide main,
    De son ongle aride
    Sur ton front candide
    Qui n'a point de ride,
    N'écrit pas : Demain !

    Il dort, innocence !
    Les anges sereins
    Qui savent d'avance
    Le sort des humains,
    Le voyant sans armes,
    Sans peur, sans alarmes,
    Baisent avec larmes
    Ses petites mains.

    Leurs lèvres effleurent
    Ses lèvres de miel.
    L'enfant voit qu'ils pleurent
    Et dit : Gabriel !
    Mais l'ange le touche,
    Et, berçant sa couche,
    Un doigt sur sa bouche,
    Lève l'autre au ciel !

    Cependant sa mère,
    Prompte à le bercer,
    Croit qu'une chimère
    Le vient oppresser.
    Fière, elle l'admire,
    L'entend qui soupire,
    Et le fait sourire
    Avec un baiser.

    Victor HUGO, Les Feuilles d'automne (1831)


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